sacrifice

Avec plusieurs femmes, dans la montagne près de Gjilan, j'ai participé à la préparation du Fli. C'est un plat traditionnel kosovar qui se cuit dans un grand récipient en métal. De larges et lourds couvercles en métals chauffés au feu de bois permettent une cuisson proche du four ou de la cuisson à l'étouffée. La pâte est souple et liquide comme une pâte à crêpes et composée seulement de farine, d'eau et de sel. Chaque couche de pâte est déposée en altermance sur la précédente. Une sorte de damier circulaire. Entre chaque couche on applique un mélange de formages battus noyés dans l'huile. Et on recommence.

La chorégraphie dure trois heures. Sans relâche, elles se relayent pour terminer le Fli et le partager avec quinze invités, voisins, maris. Les hommes sont absents de l'affaire. Ils boivent, fument, discutent et ne nous regardent pas, ne nous parlent pas. Nous sommes le feu, le foyer, le repas. Nous sommes séparées.

Le Fli est un plat très riche.

Le Fli ne se termine pas.

J'ai partagé un moment très fort avec ces femmes.

Je ne me suis jamais sentie aussi exclue en tant que femme.

Quand j'ai demandé à l'une d'entre elles ce qu'elle pensait des hommes à tables mangeant avant nous, elle m'a répondu être trop fatiguée pour y penser.

En effet elle était épuisée. Elles avaient tout donné.

Le Fli signifie "sacrifice" en albanais.

MM